[Fabre du Bosquet, Concordance, Le Mercure Dauphinois, 2002, p. 63]

1 – Prométhée, qui pour avoir ravi le feu du ciel, avec lequel il anima les mixtes de la nature sublunaire, fut attaché par Mercure sur un rocher où un vautour lui dévorait le foie qui renaissait sans cesse, supplice dont il fut délivré par Hercule. Hercule est l’artiste et le foie de Prométhée est l’aimant philosophique dont la couleur est parfaitement semblable à celle du foie ; le vautour qui dévorait le foie est l’or astral ou le noyau de l’air, attiré par l’aimant. Le vautour ou la substance qui est censée déchirer le foie ne fait que le dissoudre en partie, et finit toujours par se condenser et s’unir avec lui, en sorte que le vautour qui rongeait le foie devenait le foie lui-même. Cette conversion a fait naître l’idée aux sages mythologues, de la renaissance du foie de Prométhée […]. Le foie de Prométhée et le vautour sont les mêmes substances que Danaé qui attire Jupiter, que les ailes des talons de Mercure qui attirent celles de la tête (cf. Mercure 10), que Vénus qui attire Mars, etc.

[d’Ygé, C., Nouvelle assemblée des philosophes, Dervy, 1954, p. 78, n°3]

2 – Le mythe de Prométhée est éminemment initiatique, dans son sens général, rigoureusement circonscrit au Grand-Œuvre. Avant tout Prométhée est la personnification du génie humain, en même temps que l’exposition de sa laborieuse, patiente, voire douloureuse application avant la connaissance intégrale et l’accession définitive. D’où la parlante étymologie de son nom établie par un maître : prÒ, pro (avant, auparavant) ; et MÁtij, Mêtis (sagesse). Prométhée représente le soufre animé du feu céleste, puisqu’il est lui-même une minière de ce feu, selon le témoignage de d’Espagnet.

[Cornutus , « De la théologie grecque », dans van Kasteel, H., Questions Homériques, Beya, 2012, p. 39 et note 103]

3 – Eh bien ! selon une tradition ancienne, Prométhée a façonné la race humaine de la terre. Il faut comprendre par Prométhée (PromhqeÚj) la préméditation (prom»qeia) de l’esprit universel, que les Modernes appellent prévoyance (prÒnoia)*. C’est à elle que les choses doivent leur origine, et grâce à elle que les hommes naissent de la terre, le monde ayant été préalablement constitué dans ce but-là.

On dit aussi que Prométhée se trouvait un jour en compagnie de Zeus, car il faut toujours beaucoup de préméditation pour commander et pour être à la tête d’un grand nombre, surtout dans le cas de Zeus.

Il passe pour avoir volé le feu pour les hommes, car c’est bien notre intelligence ou prévoyance qui a conçu l’usage du feu. Ce dernier, raconte le mythe, a été porté en bas depuis le ciel, car il y abonde ; ou c’est de là que les foudres s’abattent d’un coup pour allumer ce qui se trouve ici-bas. Peut-être la férule fait-elle allusion à peu près à la même chose.

Pour cette raison, Prométhée fut enchaîné et puni : un aigle dévorait son foie. Notre adresse, en effet, qui possède ledit avantage quand il s’agit d’aider les autres, éprouve quelque embarras vis-à-vis d’elle-même : elle est liée par les douloureux soucis de la vie et par les scrupules qui, pour ainsi dire, dévorent jusqu’aux entrailles.

Prométhée avait, dit-on, un frère cadet nommé Épiméthée ('EpimhqeÚj), dont le caractère était en quelque sorte plus naïf. La prévoyance, en effet, est plus rapide que l’apprentissage et la réflexion après coup (™pim»qeia) basés sur les événements. En réalité, « le sot ne connaît que ce qui est déjà accompli ». Pour cette raison, on fait cohabiter Épiméthée avec la première femme venue à l’existence, car la femelle est d’une certaine façon moins sensée, et elle est naturellement plus portée à réfléchir après (™pimhqe‹sqai) qu’avant.

D’après quelques-uns, enfin, Prométhée (PromhqeÚj) fut l’inventeur des arts, car on n’a besoin, pour les découvrir, que d’intelligence et de préméditation (prom»qeia).

* Ou « providence ».

Voir aussi : Couleur 1