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  • Caroline Thuysbaert | Le saint Curé d'Ars, Jean-Baptiste-Marie Vianney | Inédit

Le saint Curé d'Ars, Jean-Baptiste-Marie Vianney

Quand on lit la biographie du Curé d'Ars, on est frappé par la personnalité qui se dégage des mots. Ce personnage était certainement hors du commun, doué de qualités divines. Le but de cet article est de rendre hommage à ce grand saint de l’Église catholique. Il n'a rien écrit ; seules certaines paroles, certaines lettres ont été conservées. Il n'est donc pas aisé de s'en faire une idée précise et objective, sans se laisser influencer par la subjectivité (partisane ou non) des auteurs qui ont écrit à son sujet.

L'article propose d'abord un résumé sommaire de sa vie, et ensuite un ensemble de citations issues de la bouche même du saint.

Biographie sommaire

Il est né le 8 mai 1786 à Dardilly (près de Lyon), et est mort le 4 août 1859 à Ars-sur-Formans, dans l'Ain, village appelé à l'époque Ars-en-Dombes. C'est dans ce village qu'il a résidé 41 ans de sa vie.

Il dit être né avec un caractère impétueux ; il a donc dû se faire extrême violence pour devenir doux et patient. Ce n'était pas un savant intellectuel : les études ont toujours été une souffrance pour lui.

Sa famille pratiquait la religion chrétienne et l'hospitalité. C'est ainsi que saint Benoît Labre aurait été accueilli par ses parents, avant sa naissance. 

Son enfance se passe à la campagne. À sept ans, il est berger, et semble déjà fortement attiré par la vie religieuse. Or, les circonstances politiques de son époque ne sont pas favorables à la pratique du culte : La révolution venait, en effet, de fermer les églises, de renverser les autels, de chasser les prêtres et de défendre, au nom d'une dite liberté, toute manifestation chrétienne. Toute la vie religieuse se faisait par conséquent en secret : les catéchismes, les communions, les réunions, afin d'écarter les soupçons de la police républicaine.

L'époque était sanglante, mais la famille Vianney vivait loin du double courant d'anarchie et d'impiété qui inondait la France. En l'année 1794, la paroisse d'Écully eut le privilège de donner une hospitalité clandestine à plusieurs prêtres et religieuses. Un des prêtres portait le nom de M. Balley, janséniste, grand pratiquant d'une ascèse sévère. Il deviendra l'instructeur de J.M. Vianney.

Physiquement, il avait une tête allongée et anguleuse, une chevelure abondante. On le décrit comme toujours souriant, et doté d'un humour parfois piquant.

Après avoir décidé de se consacrer à la vie religieuse, il dut s'instruire, malgré un âge déjà avancé et malgré une absence de scolarisation préalable. À ce moment, le culte public était à nouveau autorisé. Il commença ses études auprès de l'abbé Balley. Ce fut une période difficile pour lui, en raison de ses capacités limitées. C'est la prière qui lui a permis de réussir les examens insurmontables, et qui lui a donné l'accès aux diplômes requis. Malgré ses propres faiblesses, il n'a jamais méprisé l'instruction, comme certaines citations le démontreront infra.

Il a ensuite été convoqué à la guerre, mais il a déserté, ce que lui-même ne craignait d'ailleurs pas de dire.

Il fut nommé prêtre et envoyé à Ars en 1818, dans une paroisse où la foi était plutôt tiède. La propriétaire du château d'Ars, Mademoiselle d'Ars, sera une des premières à l'aider activement dans sa mission. Il créa des confréries, une Providence (orphelinat pour filles), une école gratuite, et, petit à petit, il parvint à se faire apprécier et à ramener la vie chrétienne dans le village. Par exemple, il empêcha le travail du dimanche, jour du Seigneur, ce que les habitants finirent par respecter à la lettre. Les cabarets du village furent fermés. L'église et les objets du culte furent restaurés.

Un des traits de caractère qui semblait marquer son auditoire était sa sincérité : il était souvent inondé de larmes en parlant. Parmi ses auditeurs, on trouvait des gens de toute condition, fortune et milieu social.

L'aide financière, nécessaire pour soutenir ses nombreux projets, arrivait, chaque fois, de manière providentielle et miraculeuse. Citons ces trois anecdotes :

                    Le Curé d'Ars a besoin d'une somme précise, et c'est en se promenant dans la campagne, qu'une personne inconnue lui remet un paquet contenant exactement la somme attendue.

                    La Providence n'a plus rien à manger. Le froment manque... Après avoir prié, le Curé d'Ars se rend dans son grenier.... qu'il découvre rempli de blé !

                    Il n'y a qu'un peu de blé pour faire quelques pains. Or, il en faudrait un grand nombre pour nourrir tous les pensionnaires de la Providence. Les femmes, sous les conseils du Curé d'Ars, ont ajouté, et encore ajouté de l'eau ; et la quantité de pâte ne faisait qu'augmenter comme par enchantement.

Le nombre de ces miracles en tout genre, de guérisons, de conversions spectaculaires est impressionnant, et difficilement contestable, vu les témoignages multiples qui les attestent. Il affirmait que les prodiges étaient accomplis par sainte Philomène, « sa chère petite sainte », comme il l'appelait lui-même.

Pour que le lecteur saisisse l'ambiance magique, féerique, qui régnait dans ce petit village de France, voici quelques cas de conversions, de confessions ou de prédictions surprenantes :

                    Un père demande la guérison de son enfant estropié, sans accepter pour autant de se confesser. Le Curé d'Ars obtient finalement sa confession, et au moment même où l'homme repenti détruit les objets de sa perdition passée, son enfant guérit.

                    Un homme en expédition géologique dans le Beaujolais accepte, sous l'insistance d'un ami, de venir voir le Curé d'Ars. Il se laisse entraîner par sa curiosité. Au moment où le Curé d'Ars, dans l'église, croise son regard, cet homme se sent écrasé et n'arrive plus à lever la tête. À la fin de l'office, le Curé d'Ars l'entraîne dans le confessionnal et l'homme raconte toute sa vie, et se convertit.

                    Un jour, un homme lui avoue ne pas s'être confessé depuis 40 ans. Le Curé d'Ars rectifie : « Mon ami, il y a plus que cela : il y a 44 ans. »

                    À un autre, après avoir écouté le récit de ses péchés, il dit : « Mais vous ne m'avez pas dit que tel jour, en tel endroit, vous aviez commis tel crime. » Et il fit alors le récit complet de ce qui s'était passé.

                    Parfois, il discernait dans la foule un pécheur plus coupable, plus aveugle, plus endurci que les autres. Il lui faisait alors signe d'approcher, et allait le prendre par la main pour l'amener au confessionnal. Il a même un jour « arraché » la confession d'un homme qui devait mourir quelque temps après.

                    À trois religieuses qui venaient écouter la messe, le Curé d'Ars conseille de partir tout de suite : « Mes filles, partez à l'instant, car l'une d'entre vous va tomber malade. Si vous tardiez, vous seriez obligées de rester ici ; vous ne pourriez plus vous en aller. » La chose se passa comme il l'avait dit.

                    Une dame du couvent de Sainte-Clotilde à Paris, qui avait un parent dans l'armée de Crimée, l'a fait recommander aux prières du Curé d'Ars. On a cherché, par la même occasion, à l'intéresser en faveur d'une religieuse de la maison, qui est malade ; elle n'avait que trente ans. Il a répondu : « Les armes du soldat seront heureuses. Quant à la religieuse, elle sera plus utile à sa communauté au ciel que sur la terre. » Le jeune militaire est revenu et la jeune malade est morte avant la fin du mois.

                    Il a rassuré des personnes dont un proche était décédé, en leur disant qu'il avait échappé à l'enfer.

On comprend que cette homme a eu une renommée internationale.

Malgré se volonté de quitter plusieurs fois Ars (pour se retirer dans le calme), le village a pu le garder jusqu'à sa mort.

Son but principal était de sauver les âmes. Il confessait surtout, et encourageait les impies à se convertir. Même s'il n'était pas d'une éloquence érudite, il touchait son auditoire par ses paroles.

Comme tous les hommes de grande valeur, il fut critiqué, calomnié, injurié, décrié publiquement, poursuivi, etc.

Il avait une correspondance impressionnante. Pendant 30 ans, la foule s'est pressée, de plus en plus nombreuse, pour le rencontrer. Les gens faisaient la file, et tentaient parfois de s'approprier un objet lui ayant appartenu (une page d'un livre, une pièce d'un meuble, une pièce découpée dans son habit!).

Il travaillait 16 à 17 heures par jour, entendait en moyenne 100 pénitents par jour. Il se souciait de la santé du corps, mais surtout de celle de l'âme.

Il utilisait des images fortes : il appelait le cimetière, la maison commune ; le purgatoire, l'infirmerie du bon Dieu ; la terre, un entrepôt ; son corps, son cadavre.

Après un travail acharné, après une ascèse énorme (mortifications, jeûnes, etc.), il mourut, exténué, le 4 août 1859. Son corps connut une première exhumation le 12 octobre 1885. Une deuxième eut lieu en 1904. Ses membres étaient noirâtres, sauf sa face (celle-ci est, aujourd'hui, très malheureusement recouverte d'un masque de cire). Son corps a été ouvert pour en extraire le cœur, acte qu'on qualifierait volontiers d'irrespectueux. Le Curé repose (visible à tous) dans l'église du village d'Ars et son cœur est conservé dans une chapelle du même village.

Sur sa jeunesse

« Quand j'étais jeune, je ne connaissais pas le mal, je n'ai appris à le connaître qu'au confessionnal.» (Le Curé d'Ars, p. 26)

« Quand j'étais seul aux champs, avec ma pelle ou ma pioche à la main, je priais tout haut, mais quand j'étais en compagnie, je priais à voix basse ! » (Le Curé d'Ars, p. 28)

« Si maintenant que je cultive les âmes, j'avais le temps de penser à la mienne, de prier et de méditer, comme quand je cultivais les terres de mon père, que je serais content ! Il y avait au moins quelque relâche dans ce temps-là ; on se reposait après dîner, avant de se remettre à l'ouvrage. Je m'étendais par terre comme les autres ; je faisais semblant de dormir, et je priais Dieu de tout mon cœur. Ah ! C'était le beau temps ! » (Le Curé d'Ars, p. 29)

« Que j'étais heureux, répétait-il moins d'un mois avant sa mort, lorsque je n'avais à conduire que mes trois brebis et mon âne ! Pauvre petit âne gris ! Il avait bien 30 ans, quand nous l'avons perdu. Dans ce temps-là, je pouvais prier Dieu tout à mon aise ; je n'avais pas la tête cassée comme à présent : c'était l'eau du ruisseau qui n'a qu'à suivre sa pente ! » (Le Curé d'Ars, p. 29)

« Pendant ma jeunesse, j'ai travaillé la terre ; je n'en rougis pas ; je ne suis qu'un cultivateur ignorant. En donnant mon coup de pioche, je me disais souvent : il faut aussi cultiver ton âme ; il faut en arracher la mauvaise herbe, afin de la préparer à recevoir la bonne semence du bon Dieu. » (Le Curé d'Ars, p. 32)

Sur l'instruction et les études

« Je n'ai point fait d'études. M. Balley a bien essayé, pendant cinq ou six ans, de m'apprendre quelque chose ; il y a perdu son latin, et n'a jamais rien pu loger dans ma mauvaise tête. » (Le Curé d'Ars, p. 69)

« Dieu m'a fait cette grande miséricorde de ne rien mettre en moi sur quoi je puisse m'appuyer, ni talent, ni science, ni sagesse, ni force, ni vertu. Je ne découvre en moi, quand je me considère, que mes pauvres péchés. Encore le bon Dieu permet-il que je ne les voie pas tous, et que je ne me connaisse pas tout entier. Cette vue me ferait tomber dans le désespoir. Je n'ai d'autres ressources contre cette tentation du désespoir, que de me jeter au pied du tabernacle, comme un petit chien au pied de son maître. » (Le Curé d'Ars, p. 362)

« Le plus bel éloge qu'il pût faire de quelqu'un était de dire qu'il avait de l'esprit. Quand on énumérait devant lui les qualités d'un personnage, ecclésiastique ou laïque, il manquait rarement de compléter le panégyrique par ces mots : "ce que j'aime bien surtout, c'est qu'il est savant."

M. Vianney appréciait et goûtait dans les autres les dons de l'éloquence ; il bénissait Dieu qui pour sa gloire accorde à l'homme de si beaux privilèges, mais il les dédaignait pour lui-même. Il ne se faisait pas scrupule de blesser outrageusement la grammaire et la syntaxe dans ses discours. » (L'Esprit du Curé d'Ars, p. 22)

« Les premiers mots de notre Seigneur à ses apôtres furent ceci : 'allez et instruisez', pour nous faire voir que l'instruction passe avant tout. » (L'Esprit du Curé d'Ars, p. 101)

« Je crois, mes enfants, qu'une personne, qui n'entend pas la parole de Dieu comme il faut, ne se sauvera pas ; elle ne saura pas ce qu'il faut faire pour cela. (...) Je ne sais pas si c'est plus mal fait d'avoir des distractions pendant la messe que pendant les instructions ; je ne vois point de différence. (...) Mes enfants, on sort pendant les instructions, on s'amuse à rire, on n'écoute pas, on se croit trop savant pour venir au catéchisme. Croyez-vous, mes enfants, que ça passera comme ça ? Oh, non, bien sûr ! Le bon Dieu rangera bien les choses autrement. Tenez, comme c'est triste ! On verra des pères et des mères rester dehors pendant les instructions ; ils sont obligés cependant d'instruire leurs enfants, mais que voulez-vous qu'ils leur apprennent ? Ils ne sont pas instruits eux-mêmes, tout ça court en enfer… C'est dommage ! » (L'Esprit du Curé d'Ars, pp. 102 à 105)

« Mes enfants, je pense souvent que le plus grand nombre des chrétiens, qui se damne, se damne faute d'instruction. » (L'Esprit du Curé d'Ars, p. 107)

Sur la prière et sur la volonté en Dieu

« La prière dégage la trame de la matière ; elle l'élève en haut comme le feu qui gonfle les ballons. » (L'Esprit du Curé d'Ars, p. 49)

« Plus on prie, plus on veut prier. C'est comme un poisson qui nage d'abord à la surface de l'eau, qui plonge ensuite et qui va toujours plus avant. L'âme se plonge, s'abîme, se perd dans les douceurs de la conversation avec Dieu. » (L'Esprit du Curé d'Ars, p. 49)

« Contre l'assaut incessant de ces souffrances multiples, il cherchait un appui dans l'oraison, 'qui n'est jamais sans douceur', disait-il, 'qui descend dans l'âme comme un miel', 'qui fond les peines, disait-il encore, comme le soleil fond la neige'. » (J. Vianey, p. 176)

« C'est un langage très simple qu'il conseillait de tenir à Dieu et que certainement il lui tenait lui-même, le langage qu'un enfant tient à sa mère quand il a faim, quand il va tomber, ou qu'il a besoin d'une caresse : 'Il faut demander souvent, le long du jour, les lumières du Saint-Esprit, répéter souvent : 'Mon Dieu ! ayez pitié de moi !' comme un enfant qui dit à sa mère : 'donnez-moi un morceau de pain ; tendez-moi la main ; embrassez-moi'. » (J. Vianey, p. 179)

Il insistait beaucoup sur la mort à soi-même et le renoncement à sa volonté.

« Nous n'avons en propre, disait-il, que notre volonté ; c'est la seule chose que nous puissions tirer de notre fond pour en faire un hommage au bon Dieu. Aussi assure-t-on qu'un seul acte de renoncement à la volonté lui est plus agréable que 30 jours de jeûnes. » (L'Esprit du Curé d'Ars, pp. 349-350)

« Je crois que si nous avions la foi, nous serions maîtres des volontés de Dieu ; nous les tiendrions enchaînées, et il ne nous refuserait rien. » (L'Esprit du Curé d'Ars, p. 356)

Sur la vanité de l'homme et de son corps

« En mourant nous faisons une restitution : nous rendons à la terre ce qu'elle nous a donné. Une petite pincée de poussière grosse comme une noix : voilà ce que nous deviendrons. Il y a bien de quoi être fier ! » (Le Curé d'Ars, p. 441)

« Pour notre corps, la mort n'est qu'une lessive. » (L'Esprit du Curé d'Ars, p. 33)

« Malheureusement nous n'avons pas le cœur assez libre ni assez pur de toute affection terrestre. Prenez une éponge bien sèche et bien propre ; trempez-la dans la liqueur, elle se remplira jusqu'à ce qu'elle dégorge. Mais si elle n'est pas sèche et pas propre, elle n'emportera rien. De même, quand le cœur n'est pas libre et dégagé des choses de la terre, on a beau le tremper dans la prière il n'en emporte rien. » (L'Esprit du Curé d'Ars, p. 53)

« Notre âme est emmaillotée dans notre corps, comme un enfant dans ses langes : on ne lui voit que la figure. » (L'Esprit du Curé d'Ars, p. 51)

« Voyez, mes enfants, il faut réfléchir que nous avons une âme à sauver et une éternité qui nous attend. Le monde, les richesses, les plaisirs, les honneurs passeront ; le ciel et l'enfer ne passeront jamais. Prenons donc garde. Les saints n'ont pas tous bien commencé, mais ils ont tous bien fini. Nous avons mal commencé, finissons bien, et nous irons les rejoindre un jour dans le ciel. » (L'Esprit du Curé d'Ars, p. 69)

Sur les mortifications

L'abbé Balley, sévère ascète, lui a enseigné les mortifications que le Curé d'Ars a pratiquées toute sa vie. Il les mettait en œuvre avec plus de rigueur quand il voulait obtenir une grâce particulière.

« Personne ne m'avait fait voir jusqu'à quel point l'âme peut se dégager des sens et l'homme approcher de l'ange. » (Le Curé d'Ars, p. 77)

« Dans cette voie, il n'y a que le premier pas qui coûte. La mortification a un baume et des saveurs dont on ne peut plus se passer quand on les a une fois connus ; on veut épuiser la coupe et aller jusqu'au bout. Il n'y a qu'une manière de se donner à Dieu dans l'exercice du renoncement et du sacrifice : c'est de se donner tout entier, sans rien garder pour soi. Le peu que l'on garde n'est bon qu'à embarrasser et à faire souffrir. Je pense souvent que je voudrais bien pouvoir me perdre et ne plus me retrouver qu'en Dieu. » (Le Curé d'Ars, p. 544)

« Le démon se moque de la discipline et des autres instruments de pénitence, et trouve encore moyen de s'arranger avec ceux qui en font usage ; mais ce qui le met en déroute, c'est la privation dans la nourriture et le sommeil. » (Le Curé d'Ars, p. 188)

Sur les épreuves de la vie, sur les croix

« Il faut demander l'amour des croix : alors elles deviennent douces. J'en ai fait l'expérience pendant quatre ou cinq ans. J'ai été bien calomnié, bien contredit, bien bousculé. J'avais des croix, j'en avais presque plus que je n'en pouvais porter. Je me mis à demander l'amour des croix, alors je fus heureux. Je me dis : vraiment, il n'y a de bonheur que là. Il ne faut jamais regarder d'où viennent les croix : elles viennent de Dieu. » (Le Curé d'Ars, pp. 228-229)

« Mon ami, faites comme moi, laissez tout dire. Quand on aura tout dit, il n'y aura plus rien à dire, et l'on se taira. »  (Le Curé d'Ars, p. 234)

Sur l'argent et les richesses

« J'ai remarqué que ceux qui ont des revenus sont continuellement à se plaindre : il leur manque toujours quelque chose. Mais rien ne manque à ceux qui n'ont rien. Il fait bon s'abandonner uniquement, sans réserve et pour toujours, à la conduite de la divine providence. » (Le Curé d'Ars, p. 173)

Sur le travail du dimanche

« Vous travaillez, vous travaillez, mes enfants, mais ce que vous gagnez ruine votre âme et votre corps. Si on demandait à ceux qui travaillent le dimanche : 'que venez-vous de faire ?', ils pourraient répondre : 'je viens de vendre mon âme au démon, de crucifier notre Seigneur et de renoncer à mon baptême. Je suis pour l'enfer ; il faudra pleurer toute une éternité pour rien.' Quand j'en vois qui charrient le dimanche, je pense qu'ils charrient leur âme en enfer. » (L'Esprit du Curé d'Ars, pp. 97-98)

Sur le démon, qu'il appelait le « grappin »

Très vite après son arrivée à Ars, le Curé fut perturbé par des visites nocturnes qui le terrorisaient au début. Il finit par comprendre qu'il s'agissait du démon. Ces phénomènes, bruyants et fréquents, furent attestés par de nombreuses personnes.

« Je sais que c'est le grappin : ça me suffit. Depuis le temps que nous avons affaire ensemble, nous nous connaissons ; nous sommes camarades. D'ailleurs, le bon Dieu est meilleur que le diable n'est méchant ; c'est lui qui me garde. Ce que Dieu garde est bien gardé. » (Le Curé d'Ars, p. 216)

Après l'incendie de son lit, il dit : « Le démon n'a pas pu brûler l'oiseau, il n'a brûlé que la cage. » (citation issue d'internet)

« Le signe de la croix est redoutable au démon, puisque c'est par la croix que nous lui échappons. Il faut faire le signe de la croix avec un grand respect. On commence par la tête : c'est le chef, la création, le Père ; ensuite le cœur : l'amour, la vie, la rédemption, le Fils ; les épaules : la force, le Saint Esprit. Tout nous rappelle la croix. Nous-mêmes nous sommes faits en forme de croix. » (L'Esprit du Curé d'Ars, pp. 30)

« Ce n'était pas le grappin, le grappin a la voix aiguë. » (Le Curé d'Ars, p. 571)

Ces attaques du grappin cessèrent les 6 derniers mois de sa vie.

Sur l'enfer et le péché

« Ce n'est pas Dieu qui nous damne, c'est nous par le péché. Les damnés n'accusent pas Dieu ; ils s'accusent eux-mêmes. » (Le Curé d'Ars, p. 440)

« Je ne sais pas si c'est réellement une voix que j'ai entendue ou si c'est un rêve, mais, quoi qu'il en soit, cela m'a réveillé. Cette voix m'a dit qu'arracher une âme du péché était plus agréable au bon Dieu que tous les sacrifices. J'étais alors dans toutes mes résolutions de pénitence. » (J. Vianey, p. 181)

« Ce n'est pas Dieu qui nous jette en enfer, c'est nous qui nous y jetons par le péché. » (L'Esprit du Curé d'Ars, p. 155)

« Prions pour la conversion des pécheurs, aimait à dire le Curé d'Ars : c'est la plus belle et la plus utile des prières. Car les justes sont sur le chemin du ciel, les âmes du purgatoire sont sûres d'y entrer... Mais les pauvres pécheurs, les pauvres pécheurs ! Que d'âmes nous pouvons convertir par nos prières ! Toutes les dévotions sont bonnes, mais il n'y en a pas de meilleure que celle-là. » (J. Vianey, p. 117)

Sur la difficulté de son sacerdoce

« Je sèche d'ennui sur cette pauvre terre, mon âme est triste jusqu'à la mort. Mes oreilles n'entendent que des choses pénibles et qui me navrent le cœur. Je n'ai pas le temps de prier le bon Dieu. Je ne peux plus y tenir. Dites-moi, serait-ce un grand péché que de désobéir à mon évêque en partant d'ici secrètement ? » (Le Curé d'Ars, p. 366)

« Oh ! Que la vie est triste ! Quand je suis venu à Ars, si j'avais prévu les souffrances qui m'y attendaient, je serais mort d'appréhension sur le coup. » (Le Curé d'Ars, p. 366)

« Votre auditoire ne vous a-t-il jamais fait peur ? lui demandait-on un jour. Non, répondit-il ; au contraire. Plus il y a de monde, plus je suis content. » (Le Curé d'Ars, p. 435)

Sur la vie éternelle

« Quel bonheur pour les justes quand, à la fin du monde, l'âme embaumée des parfums du ciel viendra chercher son corps pour jouir de Dieu pendant toute l'éternité ! Alors les corps sortiront de la terre comme le linge qui a passé par la lessive. Les corps des justes brilleront au ciel comme de beaux diamants, comme des globes d'amour ! » (Le Curé d'Ars, p. 445)

« Dans le ciel, on sera nourri du souffle de Dieu. Le bon Dieu nous placera comme un architecte place les pierres dans un bâtiment, chacun à l'endroit qui lui convient. » (L'Esprit du Curé d'Ars, p. 30)

« Au jour du jugement, on verra briller la chair de notre Seigneur à travers le corps glorifié de ceux qui l'auront reçue dignement sur la terre, comme on voit briller de l'or dans du cuivre ou de l'argent dans du plomb. » (L'Esprit du Curé d'Ars, p. 135)

M. Vianney aimait beaucoup raconter cette histoire : « II y avait une fois un bon religieux qui croyait qu'au paradis le temps allait lui durer. Le bon Dieu lui a fait bien voir que non. Un jour qu'il était dans les jardins du monastère, il avise un petit oiseau qui sautait de branche en branche et qui devenait toujours plus beau à mesure qu'il regardait. À la fin, il était si beau, si beau, que le moine ne pouvait en détacher sa vue ; il se mit à le poursuivre et aurait bien voulu pouvoir le prendre. Cependant il s'arrêta, pensant qu'il y avait bien une demi-heure qu'il était à courir après son oiseau. Il revint au monastère, mais il fut très surpris de trouver à la porte un frère qu'il n'avait jamais vu, et le frère ne le connaissait pas davantage ; son étonnement redoubla, lorsqu'en parcourant la maison il n'aperçut que des visages inconnus et des figures nouvelles. Il dit : Et nos pères, où sont-ils ? Les autres le regardaient sans le comprendre. Enfin il dit son nom : on chercha dans les registres et on vit qu'il y avait cent ans qu'il était sorti… Le bon Dieu lui montra ainsi que le temps ne dure pas en paradis. » (L'Esprit du Curé d'Ars, pp. 300-301)

Sur les saints

Il considérait les saints comme ses amis, en les appelant ses consuls. Il en parlait comme s'il les connaissait et racontait à leur sujet des détails inédits.

« Partout où passent les saints, Dieu passe avec eux. » (Le Curé d'Ars, p. 3)

Il aimait raconter cette anecdote : « Saint Vincent Ferrier faisait tant de miracles, que son supérieur, craignant qu'il n'y rencontrât un piège pour son humilité, lui défendit d'exercer sans permission le pouvoir qu'il avait reçu de Dieu. Un jour qu'il était en adoration devant notre Seigneur, un ouvrier qui travaillait à la réparation de l'église, tomba du haut d'un échafaud. Le bon saint lui cria :

'Arrêtez ! Arrêtez ! Je n'ai pas le pouvoir de vous ressusciter.' Puis il alla en toute hâte demander la permission dont il avait besoin à son supérieur, qui ouvrit de grands yeux et ne comprit rien à la chose, étant persuadé que, dans tous les cas, la permission arriverait trop tard. Quelle ne fut pas sa surprise, lorsque, ayant suivi saint Vincent sur le lieu de l'accident, il vit suspendu en l'air le malheureux maçon qu'il s'attendait à trouver gisant sur le pavé ! 'Allez, dit-il au saint ; faites donc tout ce que vous voudrez. Aussi bien, il n'y a pas moyen de vous en empêcher.' » (L'Esprit du Curé d'Ars, p. 361)

Sur sainte Philomène

« J'ai demandé à sainte Philomène de ne pas tant s'occuper des corps, et de penser aux âmes, qui ont bien plus besoin d'être guéries. » (Le Curé d'Ars, p. 298)

« J'étais un peu en peine de connaître la volonté de Dieu. Sainte Philomène m'est apparue ; elle est descendue du ciel belle, lumineuse, environnée d'un nuage blanc ; elle m'a dit : tes œuvres sont bonnes parce qu'il n'y a rien de plus précieux que le salut des âmes. » (Le Curé d'Ars, p. 571)

Mais les guérisons trop éclatantes suscitaient des jalousies et des critiques. Il dit : « Sainte Philomène aurait bien dû guérir ce petit chez lui ! » (Le Curé d'Ars, p. 307)

« Quelqu'un disait : sainte Philomène obéit donc au Curé d'Ars ? Certes, elle peut bien lui obéir, puisque Dieu lui obéit. » (L'Esprit du Curé d'Ars, p. 121)

« Quels étaient ces autres signes par où Dieu lui avait manifesté qu'il était content de ses services ? Faisait-il allusion à une apparition de sainte Philomène, qu'il raconta un jour en termes très discrets à Catherine Lassagne ? Qu'avait-il vu ou entendu dont le souvenir l'émouvait si fortement ? Il en a gardé le secret ; car, lisant dans les yeux de son missionnaire une trop vive curiosité, il se repentit d'en avoir dit autant et n'en dit pas davantage, ni ce jour-là, ni aucun autre jour. » (J. Vianey, p. 183)

Sur son don de prédiction

« J'ai été prophète une fois dans ma vie. Oh ! Mauvais prophète ! Prophète de Baal ! J'ai prédit qu'il viendrait un jour où Ars ne pourrait plus contenir ses habitants ! » (Le Curé d'Ars, p. 136)

Les biographies, citées en note, comportent un grand nombre de récits ; il a, par exemple, prédit sa propre mort.

Bibliographie :

– Joseph Vianey, Le Bienheureux Curé d'Ars (1786-1859), librairie Lecoffre, Paris, 1905, 204 pp.

– Alfred Monnin, Le Curé d'Ars, vie de M. Jean-Baptiste-Marie Vianney, édition de 1864 (Douniol, Paris) en fac-similé chez Hachette (BNF), 592 pp.

– Alfred Monnin, L'Esprit du Curé d'Ars, M. Vianney dans ses catéchismes, ses homélies et sa conversation, édition de 1864 (Paris, Douniol), en fac-similé par Nabu Public Domain Reprints.

– Stéphane Feye, « À propos du Curé d'Ars », in Le Fil d'Ariane, n° 28, Walhain-Saint-Paul, 1986, pp. 34 à 40.

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