Écrit par : Euripide
Titre : Hippolyte -
Andromaque - Hécube
Date de parution : 1956
Éditeur : Les Belles Lettres
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Euripide, Hippolyte, Andromaque, Hécube, Les Belles Lettres, Paris, 1956, 233 pp.
Le personnage central d’Hippolyte, fils de Thésée, adorateur exclusif d’Artémis, déesse de la chasse et de la chasteté, s’est attiré la haine d’Aphrodite. Pour se venger, la déesse de l’amour a inspiré à la seconde épouse de Thésée, Phèdre, une passion secrète pour son beau-fils. Quand Hippolyte apprend enfin, horrifié, les sentiments de la reine, celle-ci, par crainte d’une disgrâce publique, se suicide, tout en laissant derrière elle un écrit accusant le prince vertueux d’avoir voulu attenter à son honneur. Furieux, Thésée bannit son fils et le maudit en invoquant Poséidon : le dieu suscite une vague monstrueuse qui fracasse Hippolyte contre les rochers et le tue. Le poète déclare au malheureux jeune homme : «Il ne tombera pas dans le silence de l’oubli, l’amour que Phèdre a eu pour toi» (Hippolyte, vv. 1429 et 1430). On pense ici, entre autres, à la tragédie latine de Sénèque, intitulée tantôt Phèdre tantôt Hippolyte, et surtout à la célèbre pièce de Racine. Mais Euripide ne s’adresserait-il pas surtout à «ceux qui, sans étude (didaktÕn mhdεn), ont naturellement (™n tÍ fÚsei) en partage une vertu [ou : sagesse, swfrone‹n] étendue à toutes choses» (Hippolyte, vv. 79 et 80) ? Il fait sans doute allusion à l’enseignement alchimique – «physique», comme disaient les Anciens – caché derrière cette fable immorale, et que Dom Pernety a résumé comme suit : «La passion d’Hippolyte pour la chasse est la disposition de la matière à être volatilisée. Cette volatilisation marque une espèce d’éloignement et d’aversion pour l’union avec la terre qui reste au fond du vase, indiquée par Phèdre mariée avec le mercure représenté par Thésée. Comme c’est le mercure lui-même qui est cause de la volatilisation, on a feint que Thésée avait chassé son fils de sa présence. Il est en effet son fils, puisqu’il est fait du mercure lui-même. Après sa volatilisation, il retombe dans la mer des philosophes, où se forme le rocher ou la pierre des sages, et y meurt, c’est-à-dire qu’il s’y fixe ; car “mourir” et “se fixer” sont deux termes synonymes en fait de science hermétique, comme “volatiliser” signifie “donner la vie”.» (Dictionnaire mytho-hermétique, s.v. «Hippolyte») Ainsi, la fable d’Hippolyte n’est vaine que pour les ignorants : «La vie humaine n’est que souffrances, sans nulle trêve à ses peines ; mais ce qui peut être plus désirable que l’existence est enveloppé de ténèbres et voilé de nuages. Aussi nous montrons-nous follement épris de ce qui brille sur terre, quelle qu’en soit la nature, faute d’avoir l’expérience d’une autre vie et la révélation du monde infernal ; nous sommes le jouet de fables vaines.» (Hippolyte, vv. 189 à 197) «Humains, qui commettez tant de vaines erreurs, pourquoi enseignez-vous des sciences sans nombre ? Rien n’échappe à votre ingéniosité ni à vos découvertes. Mais il est un art que vous ignorez et n’avez point pourchassé encore : apprendre la sagesse à qui n’a pas la raison [ou : l’intellect,noàj].» (Hippolyte, vv. 916 à 920) L’héroïne d’Andromaque, veuve d’Hector, est devenue, après la ruine de Troie, la concubine de Néoptolème, fils d’Achille, dont elle a eu un fils. Elle subit la jalousie d’Hermione, fille de Ménélas et épouse légitime mais stérile de Néoptolème, qui cherche à la tuer en l’absence du maître de maison. Le vieux Pélée, père d’Achille, arrive à temps pour arracher à la mort Andromaque et son propre arrière-petit-fils. Craignant la future colère de son mari, Hermione s’enfuit avec Oreste, rival de Néoptolème, qui a organisé le meurtre de ce dernier. Alors que Pélée est au désespoir en apprenant le décès de son petit-fils, la déesse Thétis, mère d’Achille, apparaît pour le consoler en ces termes : «Sache la faveur que te vaudra ma couche : je te délivrerai des misères humaines ; soustrait à la mort et à la corruption, je ferai de toi un dieu. […] Tu seras désormais, dieu toi-même, le compagnon d’une déesse.» (Andromaque, vv. 1253 à 1258) Les deux citations suivantes, purement philosophiques, s’inspirent évidemment de Solon et du pythagorisme : «Il ne faut jamais traiter d’heureux nul mortel qu’on n’ait vu, à sa mort, comment il aura franchi l’heure dernière pour descendre en l’autre monde !» (Andromaque, vv. 100 à 102) «Des amis n’ont rien en propre, si leur amitié est véritable ; ils mettent leur bien en commun.» (Andromaque, vv. 376 et 377) Hécube relate les malheurs de la veuve de Priam. Après avoir connu la chute de Troie, elle est emmenée comme esclave d’Agamemnon, en compagnie de sa fille Polyxène. Or l’armée grecque est arrêtée, à la limite qui sépare le pays troyen de la Thrace, par le fantôme d’Achille qui exige, comme part du butin prélevé sur la cité vaincue, le sang de Polyxène, aussitôt sacrifiée sur son tombeau. À peine Hécube est-elle confrontée à cette perte accablante, qu’on lui apporte le cadavre de son fils Polydore, trouvé sur la plage : le roi de Thrace, à qui Priam l’avait jadis confié avec quantité d’or, pour qu’il échappe à la ruine menaçante, l’avait assassiné et laissé sans sépulture, une fois la menace devenue réalité, en s’emparant de son trésor. Avec le consentement d’Agamemnon, Hécube attire le roi perfide dans un piège et lui fait expier son crime odieux. Rappelons que l’épisode de Polydore a été commenté par le philosophe Emmanuel d’Hooghvorst, dans son Fil de Pénélope (t. I, pp. 391 à 393 ; cf. aussi p. 255). _________________________________________________________________ |