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Le Message Retrouvé et l’éventuelle organisation d’une nouvelle société Certains livres saints ont eu l’intention, entre autres choses, de donner une loi divine aux hommes, directement applicable dans la société. Il s’agit souvent de préceptes précis, concernant les rapports des hommes entre eux et avec Dieu. Les premiers exemples qui viennent à l’esprit sont bien sûr la Torah, nom traduit souvent d’ailleurs par « Loi », le Deutéronome – δεύτερος νόμος (« seconde loi ») – ou encore la šarī’a, loi révélée de l’Islam. Dans tous ces exemples, l’aspect purement législatif est souvent enchevêtré avec un sens plus profond ; la plupart du temps, le sens législatif semble même n’être qu’une « écorce » extérieure. Le Message Retrouvé de Louis Cattiaux ne fait pas exception à ce phénomène. Si ce n’est pas le premier aspect qui en ressort, il est intéressant de remarquer qu’un certain nombre de versets, tout à fait à part du reste, énoncent clairement des principes apparemment législatifs, applicables dans la société. Ceci n’exclut certes pas une interprétation plus profonde, mais semble aussi donner un précepte concret. Notre intention ici n’est pas de commenter, mais simplement de rassembler ces versets étonnants. De fait, ils sont, pour la plupart, assez énigmatiques et pourraient vite être interprétés dans un sens gauche, bien loin de l’intention de l’auteur. On trouve tout d’abord quelques principes pratiques pour l’organisation d’une nouvelle société. En fait, Cattiaux semble même, à certains endroits, prévoir un effondrement total de notre système social, voire politique ; c’est pourquoi il énonce quelques règles pour réorganiser le monde sur de nouvelles bases. Ces versets concernent des domaines très variés. Certains visent précisément une manière de gouverner et, pour ainsi dire, une autre organisation politique. Les voici : Que les pères instructeurs et juges aient au moins soixante ans, que les frères conseillers et gardiens aient au moins quarante ans et que les croyants qui choisissent librement le joug léger du Seigneur, aient au moins vingt ans. Mais le Saint-Esprit n'a pas d'âge (Louis Cattiaux, Le Message Retrouvé, XXVII, 15). Tirons nos représentants au sort parmi ceux qui ont juré obéissance à Dieu et fidélité à leurs frères dans la foi, car le choix du hasard est moins aveugle que celui des hommes. Faisons de même pour les secours et pour les offrandes destinées aux chercheurs de l'Unique, car, de cette façon, un saint pourra être aidé de Dieu alors qu'autrement, il serait toujours ignoré par les hommes. (Ibid. XXVII, 40) Nous rechercherons les hommes les plus doués et les plus capables selon leurs œuvres et selon leurs réussites dans le monde pour gouverner et pour organiser le peuple et la nation ; et nous éliminerons impitoyablement les incapables et les médiocres qui prétendent accomplir pour tous ce qu'ils n'ont pu réussir pour eux-mêmes. Nous rechercherons les hommes les plus sages et les plus saints selon leurs prédictions et selon leurs vies dans le monde pour diriger et pour maintenir le peuple et la nation ; et nous éliminerons impitoyablement les aveugles et les sourds qui prétendent imposer à tous ce qu'ils n'ont ni vu ni entendu pour eux-mêmes. (Ibid. XXI, 63) Dans ce dernier verset, ne nous y trompons pas : « éliminer », de ex et limen (« seuil, maison »), signifie proprement « tenir hors de la maison ». Nous voyons ici qu'une mauvaise interprétation de certains versets pourrait vite donner lieu à des faits indésirables, comme cela a pu être le cas dans de nombreuses religions, lorsque les Écritures eurent perdu le contact avec la tradition vivante. Un verset se rapporte plus spécifiquement à l’éducation des enfants : Nous ne cacherons pas à nos enfants qu'ils sont revêtus d'une peau de bête et nous ne leur cacherons pas non plus les appétits et les besoins de la bête, et nous les leur présenterons comme des fonctions naturelles indispensables au maintien de la vie incarnée, fonctions dont nul ne doit être fier et dont nul ne doit avoir honte, car elles sont passagères. Ainsi l'ange, n'étant plus sujet à la bête, pourra demeurer fermement tourné vers le Seigneur et la bête, n'étant plus honnie par l'ange, n'aura plus de révolte ni de vice et le Seigneur pourra nous délivrer sans lutte insensée et sans déchirement de l'une ou de l'autre partie de notre composé déchu et provisoire. Et surtout, nous ne les mêlerons pas aux mystères de Dieu, afin d'éviter les refoulements honteux, les complexes délirants, les dévoiements misérables, l'hypocrisie unanime et le gâchis épouvantable auxquels aboutit la confusion imbécile de l'ange et de la bête, que nous devons séparer nettement et non pas ridiculiser en niant l'un et en avilissant l'autre du même coup. Car la bête ira en diminuant dans les ténèbres du monde et l'ange ira se fortifiant dans la lumière de Dieu et la séparation ultime s'accomplira sans déchirement. Beaucoup reviendront à Dieu quand les hommes de Dieu ne s'occuperont plus que des choses de Dieu, c'est-à-dire quand ils laisseront les choses de la bête à la bête et celles du monde au monde.(Ibid., XXIII, 15-16) Un autre verset parle du traitement des morts : Nous laisserons nos morts quatre jours au tombeau afin qu'ils puissent ressusciter en particulier. Après quoi, nous les brûlerons afin que leurs cendres rejoignent les cendres des ancêtres jusqu'au grand jour de la résurrection générale. [...] Seuls les corps corrompus seront consumés par le feu ou enterrés à même la terre. Les corps saints qui demeurent en bon état seront conservés précieusement jusqu'au temps de la résurrection. (Ibid., XXVII, 14) D’autres versets ou parties de versets concernent plus directement la quête, la vie religieuse extérieure, le culte, ou simplement la manière dont un croyant peut subsister dans le monde – sans pour autant s’y installer. Ceux-ci semblent plus directement applicables à des hommes dès maintenant. C'est une erreur de maintenir le nez des hommes dans leurs péchés innombrables, car ils se découragent et abandonnent la religion devenue imbécile par la faute des médiocres et des ignorants bien-intentionnés en eux-mêmes et non pas en Dieu. Il vaut mieux orienter les cœurs des pécheurs vers le Seigneur dont la grâce et l'amour les délivreront de leurs ténèbres plus sûrement que tous leurs efforts réunis. La confiance en Dieu vaut mieux que la confiance en soi pour survivre. (Ibid., XXIII, 76) Que celui qui désire participer à la figure des sacrements au milieu de ses frères, le fasse librement, et que celui qui désire y participer en secret dans le Seigneur, le fasse aussi librement, sans que nul juge le choix de l'un ou de l'autre. (Ibid., XXVI, 14) Laissons vivre librement parmi nous ceux qui se vouent à l'étude des mystères de Dieu, et entretenons-les modestement, afin que la bénédiction de Dieu déborde aussi sur nous. (Ibid., XXV, 50) Quand nous commentons une Écriture sainte, un rite ou un symbole, ajoutons pour les auditeurs et pour nous-mêmes : « Voici une des nombreuses interprétations de la vérité Une. Dieu est seul maître du vêtement et de la nudité. » (Ibid., XV, 4) Si quelqu'un est tenté par le monde au point d'abandonner son état religieux, ou même, les pratiques de sa foi, qu'il aille hardiment dans le monde pourvu qu'il demeure secrètement en contact dans son cœur avec son Seigneur ; car lorsqu'il aura reconnu, par expérience personnelle, le vide, la vanité et l'agonie du monde, il reviendra guéri à jamais dans le sein de l'Unique ; et son Seigneur l'accueillera aimablement. Celui-là n'aura plus jamais envie d'aller voir au-dehors ce qui s'y passe. Celui qui peut demeurer hors du monde fait aussi bien, à la condition qu'il ne se violente pas, car, dans ce cas, c'est un démon enragé qui prospère sous la peau d'une brebis, et la dernière chute sera pire que la première au jour du jugement, quand les écorces voleront en éclats et que sera manifesté le dedans de tout être et de toute chose. (Ibid., XXIII, 4) Ne pensons pas : « Nous deviendrons riches, ensuite nous chercherons Dieu. » Mais disons plutôt : « Nous chercherons Dieu, ensuite nous serons riches. » Ne nous attablons pas devant une multitude de mets et de boissons compliqués ; disposons plutôt un plateau avec un mets et un breuvage simples comme le pain et le vin qui contentèrent nos sages pères. (Ibid., XIX, 6) Quand nous rencontrerons un croyant, nous lui dirons : « Parle-nous de Dieu. » Ainsi nos conversations seront toujours intéressantes, belles et utiles. Cependant, le silence en Dieu l'emporte encore sur le bruit dans le monde. Celui qui dévoilerait à quiconque le mystère de Dieu, et celui qui le recevrait indûment, seraient retranchés sans pardon pour l'éternité. (Ibid., XVI, 4) Ne méprisons rien ni personne, car tout ce que nous méprisons ne nous apporte plus rien de bon et finit même par se retourner contre nous. Alors la haine et le malheur succèdent au mépris et à la privation. En effet, celui qui se retranche de la vie et de l'amour est finalement retranché par les hommes et par Dieu. Ainsi nous devons prendre garde à ne jamais mépriser les êtres et les choses qui nous font vivre, mais au contraire nous devons les estimer et les aimer toujours plus, afin qu'eux aussi deviennent de plus en plus bénéfiques et aimants. Ne nous disputons au sujet d'aucune religion ni d'aucune doctrine. Étudions assidûment toutes les Écritures saintes.
- Observons la loi de l'Unique, qui est l'amour de Dieu et de sa création tout entière.
- Pratiquons sa voie, qui est le retour à la vie pure et sainte des temps anciens.
- Accomplissons son œuvre, qui est la fixation de nos vies dans le centre très parfait.
Ainsi toutes choses seront accomplies dans la splendeur dernière et première. (Ibid., XVI, 44)
Bâtis ta maison, cultive ton jardin, tisse ton vêtement, couds ta chaussure, coupe ton bois, fais ton pain, enterre le mort, arrose la terre, accouche la femme, élève l'enfant. Mets la main une fois à cela et médite le commencement et la fin du monde moyen, afin de connaître le début du monde inférieur qui s'unit à la perfection du monde supérieur. Ainsi tu te souviendras d'où tu viens, tu comprendras où tu es et tu sauras où tu vas, et la délivrance de la paix habitera en toi pour toujours. (Ibid., XIII, 22’) Pour ce denier verset encore, le philosophe Emmanuel d’Hooghvorst faisait remarquer qu’il fallait mettre la main à cela une fois. La femme, l’enfant. De quelle femme et de quel enfant s’agit-il réellement ? Citons encore ces deux versets : Prenons un métier d'homme libre et abandonnons nos déguisements. Officions et prêchons dans la langue du pays où nous nous trouvons. Faisons en sorte que rien ne nous distingue ni ne nous sépare des croyants, si ce n'est la vertu et l'exemple de la sainteté. Officions et prêchons dans la maison commune à Dieu et aux hommes, et prêchons et officions chez les croyants qui nous reçoivent. Acceptons du pauvre et méfions-nous du riche pour nous-mêmes, car ce sont les pauvres que nous devons enrichir et non pas les riches qui doivent nous corrompre. (Ibid., XV, 59) Ne nous faisons pas justice, car nous perdrions le bénéfice de nos épreuves et nous effacerions l'iniquité du méchant. Remettons-nous au jugement du Seigneur, qui sait discerner les intentions profondes et les buts éloignés. [...]. (Ibid., XV, 8) Et pourtant, le Message Retrouvé nous dit aussi : Nous ne sommes ni légiste ni juge pour vous mâcher des lois et pour vous les faire respecter, et nous ne sommes ni politique ni technicien pour vous gouverner et pour vous organiser dans ce monde. Nous sommes seulement chargés de vous rappeler la résurrection annoncée par les prophètes ainsi que le jugement de Dieu où vous serez triés, soit pour la joie, soit pour la douleur. (Ibid., XXI, 70-71) Voilà qui ne simplifie rien, ou plus exactement, qui simplifie tout... |